Cette dernière semaine d’octobre 2022, le Président de la République Emmanuel Macron a annoncé que la France sortait du traité sur la charte de l’Énergie. L’hexagone suit ainsi l’Espagne, qui l’a annoncée une semaine plus tôt, La Pologne ou encore l’Italie, sortie depuis 2016. Mais de quoi parle-t-on, au juste ?

L’actualité a été bousculée par cette annonce : la France se retire du traité sur la charte de l’Énergie. Les médias sont formels, c’est une grande nouvelle. Mais pourquoi alors presque personne ne sait vraiment de quoi on parle ? C’est parce que ce traité, raccourci en TCE, a été signé en… 1994. À l’époque, le bloc soviétique est démantelé et de nombreux nouveaux pays souverains sont nés. Cette nouvelle Europe de l’ouest souhaite préserver son approvisionnement en gaz et en pétrole et sécuriser ses investissements dans le secteur de l’énergie. Ce traité, réunissant les pays de l’Union européenne et une cinquantaine d’autres signataires, est alors signé pour favoriser leur essor et devient effectif à partir de 1998. Mais près de trois décennies plus tard, ce traité est caduc et climaticide, et sur ça, tous les spécialistes s’accordent.
Un traité obsolète
Si ce traité a eu du sens pour donner de l’élan à des pays fragilisés, il est aujourd’hui totalement obsolète. Pourquoi ? Parce que le TCE permet aux entreprises exploitant les énergies fossiles de poursuivre les pays qui modifient leur politique énergétique, si elles estiment que cela menace leurs intérêts financiers. Vous comprenez donc pourquoi nous parlions de climaticide plus haut : cela veut dire que dès qu’un état ayant signé ce traité souhaite faire avancer la transition énergétique vers une politique plus verte, les entreprises peuvent les attaquer et réclamer des compensations financières à hauteur de plusieurs milliards d’euros – environ 42 selon les estimations, et pour les deux-tiers dans des conflits intra-européens. Ces compensations peuvent être réclamées devant un tribunal classique, mais également devant un tribunal arbitral privé, un système plus opaque. « Aujourd’hui, on sait qu’il y a 150 cas d’arbitrages qui invoquent ce traité. Mais il y en a peut-être beaucoup plus, il n’y a aucune obligation de transparence », regrette Yamina Saheb, auteure du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC. Yamina Saheb ajoute également au micro de France Info : « Ce traité empêche les Etats d’agir [en faveur du climat]. Quand on en est signataire, on perd sa souveraineté sur les politiques climatiques ».
Une sortie en douceur ?
Mais si cet accord était si climaticide voire liberticide pour les états, pourquoi ne pas en sortir avant ? Car jusqu’à présent, les États européens tentaient de renégocier les termes du TCE afin de s’offrir plus de marge de manœuvre. Sans succès jusqu’alors. C’est pourquoi les annonces de sortie tombent une par une, la modernisation du traité ne portant pas ses fruits. Mais le problème n’est pas pour autant réglé. The Guardian relève que si la décision est facile à prendre, les mesures le sont moins. Car maintenant que le retrait est déclenché, il prendra une année entière avant que la sortie soit officielle, et il existe dans le traité un décret permettant des poursuites judiciaires rétrospectives. En septembre dernier, une firme allemande a par exemple fait une demande d’arbitrage contre l’État français pour la révision à la baisse, et de manière rétroactive, des tarifs d’achat pour le photovoltaïque. La France va donc sans doute devoir encore payer les entreprises membres du traité, juste pour essayer de suivre les accords de Paris, ou la simple volonté d’une transition énergétique verte.
Pour nous chez Synergie Transition, c’est une victoire pour la France et pour la transition écologique, ainsi que pour le développement et la diffusion des énergies renouvelables.